L'enfant précoce insupportable
Je rencontre beaucoup, beaucoup de parents découragés, « à bout », en pleurs. Ils m’expliquent que leur enfant est explosif, excessif, opposant. Ils se sentent démunis.
Les psychologues spécialisés et les associations, telles que l’AFEP, l’ANPEIP, l’ASEP suisse ou d’autres peuvent les aider, mais il leur faut surtout comprendre d’où vient le problème.
Qu’est-ce qu’un enfant précoce insupportable ?
C’est un enfant qui ne gère pas ses émotions et ses réactions, à cause d’une réactivité cérébrale trop intense et de l’hypersensibilité qui en découle.
C’est aussi et surtout un enfant qui va mal, car cette hypersensibilité peut faire souffrir.
Et surtout, s’entendre sans cesse reprocher des comportements qu’il ne contrôle pas, une hypersensibilité dont il est la première victime, concourt à augmenter sa souffrance et le sentiment d’être incompris et mal aimé. Cela aggrave aussi son comportement : se sentant incompris et mal aimé, l’enfant s’oppose ou explose de plus en plus souvent. C’est un cercle vicieux.
Une famille démunie face à un enfant précoce insupportable
C’est normal que parfois, les parents saturent lorsque l’enfant est vraiment insupportable, malgré tout l’amour qu’ils lui portent. Si l’enfant pique une colère, crie, se montre violent et incontrôlable, ce n’est pas le moment d’agir. Il ne peut pas se calmer et se raisonner instantanément, il faut attendre que la tension retombe. Il faut qu’il sache que lors de ces débordements, il doit s’isoler dans un endroit calme et que ce n'est pas une punition : c'est la meilleure façon d'apaiser la situation. Ensuite, il sera temps d’ouvrir le dialogue et de chercher à comprendre ce qu’il a ressenti et pourquoi il a explosé.
Pourquoi se met-il dans cet état ? Pourquoi se comporte-t-il si mal ? On pourrait poser la question autrement : « Pourquoi en arrive-t-il à être malheureux alors qu’en apparence il a tout pour être heureux ? »
« Tout pour être heureux » est une expression qu’on utilise pour parler des autres, en se référant uniquement aux apparences. Qui est compétent pour juger si un enfant a tout ou pas pour être heureux ? Les apparences sont souvent trompeuses.
Un enfant précoce peut avoir en apparence tout ce qu’il faut et manquer de l’essentiel : l’amour. Ou du moins le sentiment de compter vraiment pour ceux qu’il aime. Il peut manquer aussi de renforcements positifs : il a besoin d’entendre et voir qu’il est quelqu’un de bien, d’autant qu’il a lui-même une bien mauvaise estime de soi. Au contraire, il ne bénéficie pas assez de mots gentils, de compliments, d’œil qui brille, de fierté à son égard, alors que les critiques sont fréquentes puisqu’il se comporte mal, épuise son entourage et se montre insolent. Il est facilement blessé, car son hypersensibilité émotionnelle lui fait voir chaque réflexion, chaque reproche comme une preuve qu’il ne vaut rien et qu’on ne l’estime pas.
Le pire pour lui est de chercher à faire de son mieux et fournir des efforts, toujours plus d’efforts, sans résultat. On lui reproche même de ne pas en faire assez. Alors pourquoi essayer de faire encore plus d’efforts pour ne rien gagner d’autre que des critiques ? A quoi se raccrocher pour aller mieux si les efforts sont vains ? Il se sent tellement seul et incompris.
Il n’y a peut-être pas plus invisible que les efforts. C’est le cas pour les enfants « dys » qui font plus d’efforts que les autres, pour des résultats scolaires décevants et des reproches sur leurs résultats irréguliers et leurs efforts supposés insuffisants. On leur dit : « Je sais que tu peux faire mieux ». Oui, il peut faire mieux, mais pas constamment, car cela demande une quantité d’efforts qu’il ne peut pas fournir en continu. On ne peut pas toujours faire des efforts, surtout sans encouragement. Les parents et les enseignants doivent en prendre conscience avant que l’enfant ne se décourage durablement.
Pour un enfant précoce qui est insupportable, c’est la même chose.
Quand on déplore le comportement d’un enfant, quand on ne le supporte plus, la meilleure façon d’améliorer la situation n’est certainement pas de lui faire des reproches, le punir, le culpabiliser, l’accuser. Surtout s’il est à haut potentiel ou plutôt « à haute émotivité ».
La seule solution, c’est de chercher à le comprendre pour l’aider à aller mieux. Son comportement inadapté ou dérangeant ne pourra s’améliorer que s’il va mieux, s’il se sent compris et aimé.
On a tendance à davantage faire des remarques négatives (reproches) que positives (compliments). Et pourtant, si on faisait le contraire, ce serait tellement mieux : les gens s’entendraient mieux, seraient plus motivés pour faire un bon travail et respecter les autres, et peut-être auraient moins de problèmes psychologiques et médicaux. Il y aurait sans doute moins de violence.
« Commencez par rendre heureux ceux que vous voulez rendre meilleurs » a dit un directeur de collège, le frère Théotique, en 1839. Il avait tellement raison. Si vous souhaitez que le comportement de votre enfant s’améliore, rendez-le heureux, ou plutôt rassurez-le.
Devant un enfant difficile, épuisant, colérique et récalcitrant, la première chose à faire pour des parents est de comprendre qu’il ne fait pas exprès de se comporter ainsi, mais que c’est parce qu’il va mal : il souffre, se sent nul, anormal, pas assez bien, pas assez aimé. Il a peur.
Il souffre et on le lui reproche. Il doit faire des efforts constants pour supporter son hypersensibilité, sa réactivité, son anxiété, son besoin d’amour jamais satisfait…et on lui reproche de ne pas faire d'effort. Il fait des efforts pour essayer de se conformer aux attentes des adultes, mais ça ne leur suffit jamais. Quelle injustice à ses yeux !
Il faut comprendre enfin que pour l’aider, il faut lui montrer qu’on l’aime et le rassurer sur sa valeur. Et rien d’autre. Il n’a pas forcément besoin d’une psychothérapie, encore moins de reproches et de punitions. Juste de l’amour.
Cela ne veut pas dire qu’il faut tout lui passer et accepter ses comportements inacceptables. Il doit améliorer son comportement, mais pour cela, il a besoin d’aide, de compréhension et d’amour. Il faut lui expliquer qu’il n’est pas responsable de son hypersensibilité, mais qu’il doit apprendre à bien se comporter et contrôler ses réactions. Il n’est pas responsable de sa tendance à mal se comporter mais s’il ne fait rien pour changer, il sera responsable. Ça ne sera pas facile, mais il peut compter sur ses parents pour l’y aider.
La sophrologie peut aussi l’aider en ce sens.
(Tout ce que j’écris là sur l’enfant précoce incompris est valable pour les adultes surdoués).